Il va mieux, Luke. Il n’est plus cet homme désemparé et attristé par le décès de sa femme. Le temps passe et doucement, il a fini par se redresser. Grâce à ses amis. Sa famille. Mais surtout, grâce à May. Parce qu'un peu malgré elle, elle a fini par lui faire croire et comprendre qu’il avait le droit d’avancer et de retomber amoureux. Depuis le décès de sa femme, Luke, il s’est privé de tout. Pendant plus d’un an, il s’est renfermé dans son malheur et sa tristesse, persuadé qu’il n’avancerait jamais et qu’il resterait éternellement un père célibataire. Luisa aussi, elle a subi tout ça. Laissée à ses parents ou à sa sœur, parfois des jours entiers, n’ayant pas la force de la voir ou de s’occuper d’elle. Sa fille lui rappelle tout ce que sa femme était et poser ses yeux sur elle était difficile. Mais il s’est repris en main et maintenant, il va mieux, le pompier.

Cette journée devait s’annoncer douce et belle. Il a prévu une journée au parc d'attractions avec May. Une activité un peu particulière, avant qu’ils ne partent tous les deux en city-trip comme il le lui a proposé. Il lui a proposé de venir le rejoindre devant l’entrée en fin de matinée, pour passer à deux une journée à s’amuser et à retomber en enfance. Il aime sortir des sentiers battus, Luke. Parce qu’il revit et qu’il s’autorise de retomber amoureux, d’avancer, sans pour autant penser qu’il trompe sa femme, bien que celle-ci ne soit plus. Luke, il est redevenu lui-même. Souriant, plein de vie, aidant, le cœur plus apaisé et de nouvelles envies naissantes. Il a notamment envie que ça fonctionne, avec May. Quelques mois qu’ils sont ensemble maintenant et il a l’impression que ça va dans le bon sens, Luke. Il n’a pas envie de se brusquer ou de la brusquer. Il ne veut pas aller trop vite. Car il sait que May, elle sort aussi d’une longue relation. C’est pour cette raison qu’il a choisi cet endroit. Sauf que lorsqu’il fut prêt à aller déposer Luisa chez ses parents, ceux-ci l’ont pris d’avance en lui téléphonant, lui annonçant qu’ils ne pouvaient s’occuper d’elle aujourd'hui, leur père étant malade. Il n’a rien dit Luke, affirmant que ce n’était pas grave. Son regard se pose sur sa fille et il pousse un léger soupir. « On sera visiblement trois, aujourd’hui. » Tu lui glisses un léger sourire avec de prendre toutes ses affaires et de te rendre jusqu’au parc d’attraction, poussette dans les mains au cas où elle viendrait à fatiguer, Luisa. Car le temps file et elle grandit, la gamine. Et même s’il aime être avec elle, il aurait aimé n’être qu’avec May, aujourd’hui. C’est pourquoi une fois arrivé devant les portes du parc et une fois qu’il aperçoit May, il s’en va vers elle en faisant quelques pas, l’air un peu tracassé. « Hey ! Désolé pour le contre-temps, mais on a une invitée en plus. » Il dépose un doux baiser sur ses lèvres, sa main tenant celle de sa fille, espérant que ça ne la dérange pas trop qu’elle soit là, Luisa.

loving you's the real thing (@Luke Cusack)

Elle est capable d’aimer, à nouveau. Elle en était venue à en douter, la blonde. A se dire que ce n’était peut-être plus fait pour elle. A se répéter qu’elle finirait encore déçue. A se dire qu’il était temps de cesser de rêver des belles histoires, qu’elle peut lire dans les bouquins. Après Ezra, elle ne voulait plus entendre parler d’amour, Maybelle. Elle ne voulait plus rien de tout cela. Elle se disait qu’elle avait besoin de rester seule un temps, et c’est ce qu’elle a fait. Pendant des mois, elle s’est préservée, elle s’est fait passer en premier. Elle a pris le temps qu’il fallait pour guérir, se remettre de ses maux, panser ses plaies. Oublier la déception que lui avait causé son histoire avec Ezra, alors qu’un temps, elle croyait qu’il était le bon, the one, celui avec lequel elle finirait ses jours, même, au fond. Mais il ne s’était plus investi dans leur relation. Se contentait de la routine, du quotidien. Sans rebondissements, sans plus aucun frisson. Maintenant, il y a Luke dans la vie de May. Et leur histoire n’a rien à voir avec la précédente de la blonde. Ni même avec aucune autre. Parce qu’il est veuf, Luke. Et cela lui a demandé du temp et des efforts aussi, pour la laisser entrer dans sa vie. Mais ils y sont parvenus. Depuis quelques mois. Tout roule, ou presque – parce qu’il y a tout de même quelque chose qui la gêne, May, quelque chose qu’elle a préféré nier, dont elle n’a jamais voulu parler. Se répétant que ce n’était pas grave, important. Qu’elle pourrait s’en remettre. Accepter, peut-être.
Elle n’est pas à l’aise avec les enfants. Elle n’a pas été tout à fait honnête avec Luke à ce sujet, la blonde.

Mais plus le temps passe, plus elle y pense, May. Plus qu’elle ne le voudrait. Il faut croire que son déni ne suffit plus. Et elle craint le moment où elle ne se retiendra plus. Non, elle n’est pas à l’aise avec les enfants, persuadée de n’avoir aucune fibre maternelle. Elle n’est pas à l’aise avec Luisa, alors, et est toujours soulagée de se retrouver seule avec Luke, sans sa fille dans les parages. Aujourd’hui, elle doit le retrouver au parc d’attraction, pour un moment avec deux qu’elle attendait avec impatience. Elle se disait, May, que cela lui ferait du bien, lui ferait oublier peut-être toutes ses questions et toutes ses insécurités. Alors elle arrive, à l’heure dite, au point de rendez-vous. Et elle ne tarde pas à apercevoir Luke, au loin. Mais plus il avance, plus elle constate qu’il n’est pas seul. Luisa est là, à côté de lui, lui tenant la main. Il a la poussette aussi, évidemment. Bientôt, il la salue, l’embrassant après lui avoir expliqué qu’ils seront trois, finalement. « Oh. » Elle ne saute pas de joie, May. Elle n’arrive pas vraiment à faire semblant, et elle s’en veut pour cela. Mais, moins elle voit Luisa, mieux elle se porte. Parce qu’au contact de la petite, elle a vraiment l’impression d’être nulle, d’être la pire. « Mais ça ne risque pas d’être… compliqué ? » hasarde-t-elle, regardant brièvement la petite fille qui l’observe avec de grands yeux. « Elle ne pourra pas aller sur toutes les attractions… » Elle est trop jeune, encore. Et si elle se retrouve à faire les attractions toute seule, May, cela n’aura plus vraiment d’intérêt. « Peut-être qu’on devrait remettre ça à une autre fois. » Elle est peut-être pessimiste ; elle dirait réaliste. Peut-être surtout cherche-t-elle une porte de sortie, Maybelle, parce qu’elle se sent tout à fait mal à l’aise.