Erhling ~ No worries ♫
@Harry Gupta & @Jade Beauchamps

Les yeux rivés sur son écran d’ordinateur portable, Jade essaie tant bien que mal de terminer ce dernier compte rendu. Elle s’avance du mieux qu’elle le peut, surtout quand on sait que son agenda, lui, ne cesse de lui rappeler qu’en ce moment, elle manque cruellement de temps. Si il y a dix ans de cela on lui avait dit que son idée de projet fonctionnerait aussi bien, probablement qu’elle n’en croirait pas un mot. Et pourtant, elle semble un peu victime de son succès: un peu beaucoup. Surtout ces jours-ci. Probablement qu’il y a de la bonne pub derrière, ou bien simplement qu’en ce moment, les gens ont besoin d’un peu plus d’optimisme dans leur vie, et cela elle peut leur en donner bien volontiers. Fervente partisane de l’adage « le positif attire le positif », cette jeune française s’efforce de voir le verre à moitié plein. Et surtout, elle essaie de communiquer cette pensée positive à ses clients, avec qui elle prend la peine de passer beaucoup de temps. Elle n’est pas là pour faire du profit, même si ça reste un des objectifs, disons-le franchement ; elle est plutôt là pour faire ce qu’elle aime: conseiller et aider les gens au mieux en les aidant à croire en une belle histoire et en les mettant sur le chemin de l'Amour. Jade jette un oeil sur cet agenda en papier recouvert de griffonnages  au crayon, de petits dessins, mais aussi et surtout, de tous les rendez-vous qu’elle a aujourd’hui. Elle les passe en revue, et pendant que son doigt manucuré d’un vernis rouge parcourt chacune des indications reprises, elle s’arrête sur l’interview prévue pour un journal qui souhaite publier un article sur ce concept, sur cette agence qui lui tient tellement à coeur désormais. Ce rendez-vous l’angoisse un petit peu, mais malgré tout, elle s’efforce de se dire que sa meilleure arme sera de rester la plus naturelle possible.

Jade prend une minute ou deux pour se diriger vers la petite cuisine installée à l’arrière de son agence pour se servir un verre d’eau. Elle voit l’heure qui tourne, mais surtout les minutes qui s’écoulent avant ce rendez-vous qui reste un des plus importants de la journée. Elle compte passer les minutes restantes à répondre à des mails, lister ses facturations, mais également confirmer d’autres rendez-vous. En bruit de fonds, la jeune femme a mis en route une playlist de RÜFÜS DU SOL. La musique, on l’entend à peine, de quoi apporter une ambiance autre que celui d’un funérarium où personne n’ose parler, où personne n’ose même penser trop fort. De temps en temps, sa jambe balance sur le rythme de la musique électronico-chill, et son esprit, lui, s’évade à nouveau dans une concentration qu’on lui connait lorsqu’il s’agit de son boulot, de son agence. Finalement, Jade ne fait plus attention à l’heure, et se voit avancer quand le carillon au-dessus de la porte se fait entendre, à chaque fois qu’une personne passe la porte de l’agence. La jeune française relève aussitôt la tête, non sans un regard furtif sur sa montre, pour se rendre compte que c’est l’heure. Elle se lève pour se diriger vers l’entrée et accueillir l’inconnu qui écrira sur elle et sur ce qui rythme sa vie depuis qu’elle a décidé de mettre ce projet sur pied. Le sourire ne la quitte pas, elle reste détendue du mieux qu’elle le peut et s’approche du journaliste « Bonjour, bienvenue ! » Elle lui tend la main, l’invitant à la serrer, avant de reprendre « je suis Jade, enchantée ». Pas besoin de donner son nom de famille, très probablement que de toute façon, ce garçon le connait. Et puis de toute façon, étant donné le peu d’âmes errant dans cette agence, la confusion n’est pas encore de mise. « Venez, on va s’installer là-bas, on sera plus à l’aise » lui dit-elle, non sans le mener vers une pièce à part joliment décorée dans un style français, avec des touches de blancs et de pastels dans laquelle se trouve un petit salon avec une table, des fauteuils, mais également un canapé. Jade en profite également pour attraper son ordinateur portable, son téléphone et son agenda au vol et dirige son invité dans le lieu dit « Vous souhaitez boire quelque chose ? J'ai du thé, du café, de l'eau, de la grenadine à l'eau et... et je crois que j'ai même du gin...» Lui demande-t-elle en l’invitant à s’installer. Malgré l’appréhension de l’inconnu, la française ne perd pas la face, ni même son sourire. Elle semble ouverte, décontractée et naturelle. Naturelle, oui peut-être, souriante aussi, très certainement, mais pas si décontractée que ça, en réalité. Elle a juste appris à le cacher, ou encore le camoufler.  

hj:

 
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Jade n’est pas vraiment à l’aise à l’idée de dévoiler son trésor à un journal et pourtant, elle en reste malgré tout assez fière. C’était preuve que ce qu’elle faisait avait un sens, et peut-être même qu’elle faisait bien son boulot. En tout cas, c’était ce qu’elle avait envie de tirer comme conclusion à cette interview. Mais ne va-t-elle pas finir par se dévoiler elle, plutôt que ce pourquoi elle met autant d’énergie ? Elle a conscience que les journalistes ont parfois tendance à être subtilement vicieux dans leurs questions, et il lui suffit de se laisser emporter par sa passion pour son travail, pour finalement en arriver à dévoiler ce qu’elle n’a pas envie de dévoiler. Elle se sent prête, malgré tout. Elle réfléchit à plusieurs situation pouvant se présenter à elle, et cherche en même temps une manière de réagir, une ligne directionnelle pour mener cette interview. Pourtant, ce n’est pas son rôle, mais bien celui de ce journaliste qui, bientôt, passera le pas de la porte. Chacun son boulot, chacun à sa place et il y a de grande chance que ça se passe assez bien. Le naturel, Jade. Le naturel. C’était ce que lui avait conseillé sa mère, qui pourtant n’y connaissait pas plus qu’elle en matière d’interview. Finalement, elle en arrive à se focaliser sur son boulot, pour éviter de penser, et de réfléchir ; mais surtout de ce monter la tête. Finalement, peut-être que si elle avait été présidente de la République, qu’aujourd’hui elle arriverait à mener à bien une interview. Et elle arriverait à réfléchir avant de parler… voila probablement le plus important : réfléchir avant de parler.

Le bruit de la porte la tire de ses songes, mais surtout de son travail. Il ne lui faut pas beaucoup de temps pour rejoindre le hall d’entrée et se trouver face à un jeune homme. Harry Gupta, se présente-t-il. Bien. Elle ne cache pas son sourire, se voulant accueillante, à défaut de se sentir super à l’aise par ce nouvel exercice se proposant à elle. Elle doit faire semblant, faire bonne figure et surtout garder un peu – beaucoup – de self-control. Dans la pièce où elle a emmené son invité, Jade fait de son mieux encore pour que ce rendez-vous se passe au mieux, laissant derrière elle ces aprioris sur le monde du journalisme. Probablement qu’elle mélange les journalistes et les paparazzis. La différence, c’est que les paparazzis s’intéressent davantage aux célébrités, ce qu’elle n’est pas. Il y a donc peu de chance que ce jeune homme en soit un.  Jade se retourne vers son invité lorsqu’il lui demande du Gin. Pas sûre de prendre ça au sérieux ou pas. Il lui faut même plusieurs secondes pour se rendre compte qu’il est déjà en train de la faire marcher. « Sinon… du thé chaud au Gin. » dit-elle avec tout le sérieux du monde « Ca existe vraiment. » Alcoolique ? Non, pas du tout. Mais c’est dans ses habitudes de parfois se rendre dans un bar avec ses amies pour se détendre, et boire un cocktail. Un cocktail chaud auquel on ajoute du citron et de la cannelle. « N’allez pas indiquer que je suis une alcoolique et que mon agence cache un sous-sol clandestin pour alcoolique... Promettez-le » lance-t-elle en se retournant vers le dénommé Harry, son sourire pour ponctuer ses paroles. Elle finit par se rendre vers la cuisine pour préparer la boisson demandée, mais également un cappuccino pour elle-même. « Je suis dans cette ville depuis presque 8 ans, mais j’ai mon agence depuis 5 ans. Avant, je travaillais comme serveuse dans un tearoom. » Totalement rien à voir, il te fallait juste un petit boulot pour te permettre de monter ton petit projet de ton côté, tout en gagnant suffisamment d’argent pour mener à bien ta petite vie dans ce nouveau pays « Et vous ? Depuis combien de temps errez-vous ici ? » Jade revient avec les tasses, qu’elle dépose devant le journaliste, puis l’autre en face, où elle compte s’installer « Jamais, jamais ? Moi qui pensais peut-être faire repeindre l’entrée en rouge, vous venez de m’enlever toute hésitation » elle plaisante, le rouge c’est joli pour des fleurs, des robes, du vernis ou encore du rouge à lèvre, mais une enseigne rouge, ça peut vite virer au vulgaire. Et puis associer le rouge et l’amour, pour toi ça reste un peu trop stéréotypé. « Vous n’avez donc jamais cherché à vous rendre dans une agence matrimoniale ? Ou vous ne connaissez personne qui l’a fait ? » Parfois, ça peut être dérangeant. Voir même carrément malaisant. C’est un peu comme entrer dans un sextoys, on a toujours cette peur des préjugés. Les agences matrimoniales, on pourrait penser que seuls les gens désespérés osent passer la porte de cet endroit… Concernant ce cher Harry, peut-être est-il marié à la femme de sa vie depuis l’âge de 18 ans, et qu’il la connait depuis sa plus tendre enfance. Si tel est le cas, dans ce cas sans doute qu’il croit suffisamment en l’amour pour penser que oui, une agence matrimoniale, ça peut servir. Jade ne sait pas réellement sur quel ton doit-elle prendre sa remarque sur son projet, mais étant de bonne humeur et de naturel naïvement optimiste, elle préfère prendre cela comme un compliment, et surtout, avec le sourire. Elle attrape son agenda pour montrer à son interlocuteur que oui, elle avait même son emploi du temps assez chargé « Eh oui ! » et puis alors que ses doigts viennent attraper la cuillère dans son mug pour la faire tournoyer dans le liquide encore chaud, Jade relève les yeux vers l’homme en face d’elle « Vous êtes sceptique, non ? ».
 

 
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Jade était ce petit bout de femme qui aimait tenter de nouvelles expérience. Sa situation professionnelle en témoignait : Partir de son pays natale pour se retrouver dans une ville dont elle ne connaissait absolument rien ni personne faisait partie aussi de ces nouvelles expériences. Elle ne regrettait rien, elle était contente d’être ici ; et si parfois le mal du pays se faisait ressentir, il ne durait jamais bien longtemps avant de repartir, doucement, sur la pointe des pieds. Le thé au Gin fait également partie de ces nouvelles expériences. Eh oui. L’a-t-elle déjà gouté ? Oui. Mais n’étant pas une fervente amatrice de thé de base, elle n’était pas réellement étonnée de ne pas avoir aimé. Cependant, elle était sortie fièrement de ce bar, avec ses amies. Fière d’avoir gouter ce breuvage hors du commun. Il ne lui fallait pas grand-chose pour être fière, certes, mais elle avait pu néanmoins ajouter cette expérience sur sa bucket list. Audacieux, ou simplement curieux, son invité semble vouloir se prêter au jeu, lui aussi. La jeune française s’exécute en lui apportant cette nouvelle expérience liquide, curieuse de voir si lui, il appréciera « Ok. Alors si vous êtes ici depuis toujours, quel est votre endroit préféré ? » c’était son truc à elle, depuis qu’elle avait frôlé le bitume de cette ville : dès qu’elle discutait avec un habitant de cette ville, elle lui posait cette question. Une manière différente pour elle de découvrir des coins parfois moins touristiques, ou carrément insolites. Les mains tenant son mug afin de garder la chaleur de celui-ci rien que pour elle, Jade s’adossa dans le fond du fauteuil dans lequel elle s’était installée. Le mug également posé sur son genoux croisé, elle pouvait également sentir la chaleur sur celui-ci. De quoi bien la réchauffer, que demander de plus pour une frileuse comme elle ? « Votre mère viendrait dans ce genre d’agence, ou votre mère vous pousserait à y venir ? » demande-t-elle, curieuse. Ce n’était en rien de la curiosité mal placée « Je crois que la mienne, ça ne serait pas du tout son genre. » et pourtant, cette agence n’était en rien un sujet tabou dans la famille de la Française. Ce qui était certain, c’est que ce journaliste avait de la sincérité à revendre. Et Jade pris ses réponses comme elles venaient, sans pour autant se froisser, ni porter aucun jugement. Des personnes qui ne croyaient pas en l’amour, elle en voyait tellement. Déjà rien que parmi ses clients. Son boulot, justement, était de leur prouver le contraire « Alors comment expliquez-vous que certains couples sont ensemble depuis vingt, trente, parfois cinquante ans ? » Ses parents à elle, par exemple. Ses grands-parents. Jade prend un temps avant de répondre. Elle cherche les mots pour s’expliquer, ou pour entrer dans un débat, sans pourtant faire de ce débat quelque chose de houleux « Tout dépend de ce qui définit le bonheur pour vous. Le bonheur, c’est l’objectif de tout être humain, je crois. Mais la notion du bonheur n’a pas la même signification pour chacun d’entre nous. Après, je suis entièrement d’accord que l’amour n’est pas la clé du bonheur, mais je ne suis pas certaine qu’un homme – ou une femme - d’une trentaine d’années qui a le physique, le travail, la santé, les amis, la famille se sente pleinement heureux sans un amour réciproque. Sinon, nous ne serions pas des milliards à le chercher… » Jade porte son mug à ses lèvres, non sans quitter son interlocuteur du regard. Convaincue que son travail et son agence ne sont pas vains, elle était persuadée que si l’amour n’amour ne faisait pas le bonheur, il y contribuait très certainement. La brunette laisse un rire s’échapper en voyant la grimace de Harry face à son thé au Gin « Je peux vous refaire du thé sans Gin, si vous voulez ? Je m’en voudrais de vous empoisonner alors que c’est ma toute première interview ! » dit-elle fièrement, alors qu’en réalité, encore une fois, il n’y avait pas de réelle raison d’être fière. Jade était un peu ce genre de personne qui s’enthousiasmait pour pas grand-chose, parfois « Petite, je voulais être Présidente de la République. Je voulais que mes parents soient fiers de moi, alors que je ne savais même pas en quoi ça consistait réellement. Puis, je me suis dis que c’était le métier le plus chiant du monde, très probablement. Je me mettais beaucoup de pression pour trouver le métier de mes rêves, au point que lorsqu’ils m’ont dit que j’avais encore le temps de trouver, je me suis vexée et je suis partie avec ma valise – vide – sur la plage de Deauville pour y bouder pendant une ou deux heures. » commence-t-elle en rigolant. Un peu gênée de la petite peste qu'elle semblait être, mais heureusement, ce temps semble révolu. « Et puis finalement, en regardant mes parents, je me suis rendu compte qu’ils étaient heureux. Pourtant, je n’ai pas grandi dans une famille pleine aux as. Je n’ai pas eu tous les jouets qu’un enfant aimerait avoir, et je ne suis pas partie en vacances tous les étés. Mes parents ne sont pas riches, mais ils sont au moins riches en amour. Je me suis dit que si eux y sont arrivés, pourquoi pas d’autres personnes ? Et c’est l’objectif que je me suis fixée. C’était carrément abstrait, mais je voulais essayer. Vraiment. » Têtue, ou carrément obstinée, Jade n’avait rien voulu faire d’autre de sa vie, sans avoir la certitude que cela ne fonctionnait pas. Aujourd’hui, elle est heureuse de voir que ça aide des gens. Et c’était son objectif, qu’elle continue encore à poursuivre. « Vous savez, je ne suis pas magicienne et je ne suis pas madame Irma, ou encore moins un charlatan qui soutire de l’argent à ses clients. Tout est basé sur de la psychologie et du développement personnel. Le plus souvent, chacune de ces personnes ont simplement oublié de s’aimer. Ou se sont simplement oublié tout court. Je leur apprends juste à aimer et quand ils arrivent à s’aimer eux, alors ils ont les cartes en main pour aimer une autre personne » Jade haussa les épaules, pas certaine d'avoir été très convaincante, face à un homme qui ne croyait pas en l'Amour, alors elle reprit simplement « Vous pouvez m’appeler Jade ».